Grosse exclusivité chez Rockfanch cette semaine avec l'interview d'Irvin (chanteur) du groupe Darcy qui dévoile le projet de LP du groupe !
D’où vient le nom « Darcy » ?
Rien de très précis. On ne voulait pas quelque chose de cérébral ni rempli de symbolique quelconque alors l'idée de donner un prénom nous est apparue évidente. Darcy sonnait bien, ça ne va pas chercher plus loin.
Quelles sont les influences du groupe ?
Elles n'ont jamais cessé d'évoluer, du rock US au rock français principalement. On écoute de tout mais ces derniers temps, du gros rock'n roll tourne pas mal dans nos enceintes. On a découvert Russian Circles récemment, c'est vraiment fat ! Et pour ma part je ne décroche pas des dernières compos de Michel Cloup.
Peux-tu nous présenter ce premier LP de Darcy ?
C'est un disque dont nous sommes très fiers. J'ai toujours trouvé dur d'être pleinement satisfait d'un travail artistique. Je ne suis pas forcément comblé à 100% de tout ce qu'on a pu sortir auparavant, mais des EP n'ont pas le même impact qu'un album dans la vie d'un groupe. Se lancer dans un LP, surtout le premier, est quelque chose de très intense parce que c'est une prise de risque et c'est ce qui va forger ton identité auprès de tous. Et là, on s'est rendus compte qu'on ne pouvait pas faire mieux que cet album au moment où on l'a composé ! C'est un album de rock français dans le sens noble du genre qui a perdu de sa valeur ses dix dernières années. Un album tendu et très rentre-dedans. Vous ne trouverez pas de claviers ou autre instrument synthétique, l'album a été entièrement composé avec des guitares. Et il y aura quelques surprises à la fin du disque...
Est-ce qu’il y aura des titres de « Bile Jaune » sur cet album ou on est dans une démarche totalement différente ?
Oui il y aura des titres de l'EP Bile Jaune qui était en fait une introduction à cet LP. Justice, 170 et Bile Jaune seront donc dans la playlist mais dans des versions revues, corrigées et ré-enregistrées. L'album ne s'éloignera donc pas trop de l'esprit de l'EP mais avec un son plus rock. Je pense que ceux qui ont déjà aimé ce quatre titres auront une agréable surprise en écoutant l'album. Le propos est mieux maîtrisé que ce soit dans le fond ou dans la forme. On a gardé cette tension déjà présente sur Bile Jaune mais en la poussant à son extrême. C'est un album puissant qui ne laissera pas indifférent.
Est-ce que Arnaud Jézequel (production, Dolly) et Romain Baousson (mixage, Apochela) sont reconduits pour vous aider à produire et à mixer cet EP ?
La démarche est différente ici. L'EP avait été enregistré en studio, ce qui n'est pas le cas de cet album. Avec le recul, nous nous sommes aperçus que le studio et les oreilles extérieures n'apportaient pas vraiment de valeur ajoutée par rapport à ce qu'on voulait réaliser au départ. On a fait le pari de faire ce premier disque comme on l'entend et surtout comme on le joue depuis un an dans notre local. C'est Romain Baousson qui s'est occupé de l'enregistrement mais c'est Bernard-Marie (bassiste du groupe qui a récemment mixé le maxi de "Saintes") qui s'est collé au mixage. Il y a quelque chose de plus sain et de plus honnête dans cette manière de procéder.
Le précédent EP de Darcy était distribué via un dispositif widrop. Tu peux nous expliquer comment ça marche et comment est arrivée l’idée de ce projet ?
Je suis tombé par hasard sur le projet de cet hacker rennais (qu'on appellera Human 0.9), le widrop, qui consiste en un système de peer-to-peer urbain. Concrètement, Human 0.9 dépose des boîtes, qu'il utilise comme sorte de serveurs, dans certains points de la ville. Il peint une tête de mort dans la rue qui héberge la boîte et ensuite il te suffit de te rendre au point widrop et de te connecter avec ton smartphone ou ton pc portable pour télécharger l'EP. J'ai toujours été fasciné par l'univers des pirates du net ! On ne voulait pas vendre cet EP mais l'idée d'une simple distribution gratuite en téléchargement libre sur bandcamp ou autre ne me plaisait pas non plus. Vous voulez l'EP de Darcy ? Ok on vous le met à disposition mais faites au moins l'effort d'aller le chercher. C'était ça le but. Le supermarché à la maison, je ne suis pas pour.
Justement est ce que ce premier album aura un motif de distribution particulier ?
On va vraisemblablement remonter une action avec Human 0.9, c'est quelque chose qui nous tient à cœur de développer un autre système de distribution plus "local" pour Rennes en tout cas. Pour ce qui est de la distribution nationale, on est encore en période de mixage donc on y réfléchit doucement...
Tu penses qu’il faut vraiment toujours innover en matière de musique, que ce soit dans la composition et la distribution de la musique ?
C'est indéniable ! Je ne comprends pas qu'avec tous les outils et tous les acteurs qui existent dans l'innovation numérique que la plupart les artistes de musiques actuelles ne se posent pas la question d'une nouvelle distribution ! Il y a des milliers de choses à faire mais au final tout le monde garde le même schéma. Et ça ne fonctionne pas. Soyons honnête YouTube joue aujourd'hui le rôle de label, de distributeur et de diffuseur en un sens. Il y a quelque chose d’aberrant dans tout ça. Il faut que les artistes comprennent que le seul véritable avenir dans la musique est de DIY.
J’ai lu que les paroles du précédent EP avaient été écrites dans la colère… Cette émotion permet de trouver les mots justes pour écrire du rock, une musique enragée de nature ?
En un sens oui. Mais je n'ai rien choisi... Je ne me suis pas dit, "je vais écrire un album rock enragé alors je dois chercher la colère". "Bile jaune" et cet album (qui n'a pas encore de titre) forment l'instantané d'un état dans lequel je me trouvais. Le rôle de l'artiste est de mettre des mots, des notes ou des images sur une sensation ou une émotion que toi-même tu as du mal à définir. C'est en ça que tu te reconnais dans les disques que tu achètes ou dans les artistes que tu suis. Là c'est la même chose. C'était un état de ras-le-bol, le côté "je tiens sur un fil" qui est dépeint ici. Je ne sais pas si les paroles de cet album en particulier ont toutes été écrites dans la colère, mais une chose est sûre, ça a été enregistré dans la colère.
Pendant qu’on parle de paroles … Pourquoi ne pas avoir cédé à l’écriture en anglais comme beaucoup de groupes de Rennes ?
Je ne comprendrai jamais ça ! Et ce n'est pas pas un phénomène renno-rennais, c'est un constat national. Tous se cachent derrière l'écriture en anglais. Ils vont te trouver mille excuses : que ça sonne mieux, que le rock par essence c'est en anglais... Moi je leur réponds qu'ils ne sont tout simplement pas foutus d'écrire un texte en français ! Ils ne savent pas écrire tout court d'ailleurs. Il faut arrêter avec cette hypocrisie et ce complexe ridicule, parce qu'il est là le vrai problème. Est-ce qu'on demande à un rappeur français pourquoi il écrit en français ? Non, parce qu'eux ne vont pas te dire "le Wu Tang rappe en anglais donc je dois rapper en anglais". Ils travaillent leurs paroles, ils balancent des allitérations, des assonances, ils ne se cachent pas derrière une mauvaise soupe avec une voix sous-mixée sous prétexte qu'ils n'assument pas ce qu'ils écrivent.
Il y a aussi des projets parallèles à Darcy dont l’association avec le rappeur Doc Brrown. Tu peux nous raconter un peu l’histoire de ce projet ?
C'est une histoire d'amitié à la base. On se connaît depuis dix ans et on a passé beaucoup de soirées ensemble à juste écouter du son, mater des concerts et passer des heures sur YouTube. On a vite compris nos points communs en matière de musique et d'envie mais jamais l'idée de bosser ensemble ne nous était venue. C'est arrivé très tard bizarrement. Au début Doc nous voulait pour un featuring sur son album, et quand on a commencé à composer, on s'est rendus compte qu'on ne voulait pas s'arrêter à un titre. Il y avait plein d'idées qui jaillissaient. Ça devenait trop évident de monter un groupe et donc on a lancé "Doc Brrown vs. Darcy". Un nom simple, on ne voyait pas l'intérêt de trouver un nom différent de qui nous sommes. En ce moment on compose notre premier EP et on est super contents de ce qui se prépare !
Des artistes avec lesquels vous aimeriez travailler ?
Le premier nom qui me vient tout de suite à l'esprit c'est Keny Arkana. On adore cette artiste que nous n'avons jamais eu l'occasion de voir sur scène et on le regrette amèrement ! Mais cette fille a vraiment quelque chose de poignant et de sincère. Avec Doc Brrown on a vraiment pris conscience de la richesse des musiques urbaines de ces 5 dernières années. Elles n'arrêtent pas de muter, d'évoluer, de s'entremêler ça va presque trop vite ! On aimerait vraiment explorer cet univers et ses acteurs.
Un scoop pour Rockfanch ?
On remonte sur scène après un an cloîtrés dans notre local de répétition à l'occasion du festival "Dire le Monde" à Saintes le 22 février prochain. On est super impatients.
* Crédit photos : Vincent Joué
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