Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Rockfanch

[INTERVIEW] BAZAR BELLAMY

Publié le 14 Novembre 2019 par rockfanch

[INTERVIEW] BAZAR BELLAMY

Comment est né Bazar Bellamy ?
* Georges (chant) : Bazar Bellamy est né des cendres d'un autre groupe baptisé Plugin Sparta. Ce groupe est aussi né aussi d'une double intention : celle d'associer des textes en français à la puissance électrique. Les quatre membres de base du groupe qui sont Ludo (basse), Pablo (guitare), Loulou (batterie) et moi même on se connait depuis très longtemps et on a joué dans pleins de groupes ensemble. Bazar Bellamy est venu de l'envie commune de retrouver la patate, l'énergie dans notre musique. Revenir à la source de ce qui nous a motivé à faire de la musique au départ.

Pourquoi ce nom de Bazar Bellamy ?
Au départ, c'était une référence au Bel Ami de Maupassant. Ludo, le bassiste, m'a fait part de ses doutes quand au nom. Il trouvait trop intello, trop littéraire. Je pense qu'il avait raison. Le Y est arrivé, pas par rapport au chanteur de Muse, mais pour éviter que ce soit trop connoté littéraire. Bazar, c'était pour trouver un mot qui s'associe un peu au côté dandy, propre sur soit. Sans oublier le côté furieux et bordélique qu'on donne à notre musique. Surtout ce nom, Bazar Bellamy, donne la possibilité au projet d'évoluer. J'adore l'idée d'être associé à d'autres formes d'expressions artistiques comme des comédiens, des circassiens, tout ce que l'on peut imaginer. Le terme Bazar est un fourre tout, qui peut ouvrir vers d'autres possibilités. 

Au niveau des influences musicales, ça tape dans quoi Bazar Bellamy ?
On a tous baigné dans le rock d'Outre-Manche et d'Outre-Atlantique... Mais aussi d'Outre-Quiévrain ! Le rock belge a une grosse influence sur notre musique. On est inspiré par les projets de Josh Homme, avec les Queens of the Stone Age en tête. J'aime bien aussi la démarche de Dave Grohl avec des passages de Nirvana ou des Foo Fighters. Pour les grandes racines musicales de Bazar Bellamy, ça va des Stones en passant par les Beatles pour les plus anciens mais aussi on tape dans la brit-pop avec Blur, dont je suis un grand fan. On adore aussi le travail d'un groupe hollandais, De Staat. On est tous fan au sein du groupe. Pour les artistes français, il y a Noir Désir c'est incontournable. Eiffel, Aston Villa, Lunatic Age... Des groupes qui pour beaucoup ont péréclités. Du Bashung aussi comme Dimoné, The Hyenes... Mais nos racines restent plus  anglo-saxonnes, que ce soit dans l'approche de notre musique ou le traitement de notre son. La difficulté est là aussi, faire ressortir la voix de ce magma sonore.

Pourquoi chanter en français ?
Parce que je ne suis pas assez bon en anglais ! Je ne me sentais pas légitime pour continuer de chanter en anglais. Je l'ai souvent fait avec mes autres groupes, chanter en anglais. Là dans la dernière formation, Plugin Sparta, j'écrivais tout en anglais et on m'aidait à le faire. Je me faisais coacher sur les textes et la prononciation mais je ne trouvais pas naturel de m'exprimer dans une langue que je ne maîtrisais pas suffisamment. Même si j'adore la culture anglo-saxonne, je ne me sens pas assez "vrai" pour m'exprimer dans cette langue. Le fait d'écrire et de chanter en français, c'est tellement plus naturel et évident pour moi. Surtout, j'arrive à traduire mes émotions. C'est une démarche nettement plus sincère pour moi. 

La musique de Bazar Bellamy est brute, mais les émotions que tu exprimes à travers tes textes le sont tout autant... 
Complètement ! Il y a des choses que j'ose en français que je n'oserai pas en anglais. Par exemple, dans Démodé, je recréé un mot "indoctabilisé". C'est un mot qui n'existe pas en français. Bidouiller un mot en français, créer quelque chose, c'est jouissif ! Je suis plus libre en français qu'en anglais parce que c'est ma langue maternelle. Je maîtrise plus cette langue que l'anglais, je suis plus libéré dans ma façon d'aborder les textes. Aussi, la réaction du public est immédiate. Je vois directement leur réaction. L'anglais, quoiqu'on en dise, ça met une distance. Ou alors il faut avoir des textes très rock 'n' roll à l'américaine. C'est sujet-verbe-complément... Ce qui ne veut pas dire que c'est pauvre, c'est juste plus efficient. Il faut aussi pouvoir sortir la voix derrière pour qu'on puisse comprendre. 

Il y a aussi des influences littéraires dans Bazar Bellamy, qu'est ce qui t'inspire pour écrire ?
Je lis de moins en moins, malheureusement. Même si ça m'arrive encore ! Je suis sans doute plus influencé par les paroles d'autres chansons et la façon d'écrire des auteurs. Mais aussi par des posts sur les réseaux sociaux. Certains m'inspirent plus que la littérature. J'ai fait mon bac français, j'ai beaucoup lu à une époque mais on revient toujours à la lecture. Actuellement, je m'inspire aussi du rap à l'instar du groupe Odezenne dont j'aime beaucoup la façon d'appréhender l'écriture. 

[INTERVIEW] BAZAR BELLAMY

Votre album est sorti il y a une semaine et a été baptisé Jusqu'ici tout va bien. Pourquoi ce nom ?
Parce que c'est générationnel d'abord. Il y a la vanne dans le film La Haine. Vincent Cassel raconte l'histoire d'un mec qui se jette dans le vide et qui dévale les étages. A chaque étage, avant de toucher le sol, le gars se dit "Jusqu'ici tout va bien". Par rapport à notre génération, les quadras, ça nous parle de suite parce que c'est un film avec lequel on a grandit. C'est aussi le fait que c'est une vanne et c'est une phrase inévitable avant de se prendre un choc. Comme la situation écologique actuelle. Une sorte de pied de nez à une issue qu'on sait déjà toute pourrie et dont on ne pourra pas se sortir mais on fait semblant en se disant que "jusqu'ici tout va bien". Pour moi l'environnement est primordial mais on voit aussi que nos libertés se dégradent, la capacité d'expression, de réflexion... On se dit tous les jours que jusqu'ici tout va bien parce que, pour le moment, on peut discuter, boire un café et faire du bruit avec une guitare. Mais c'est une forme de rassurance assez médiocre. 

L'album a été enregistré avec Nicolas Bonnière. C'est vous qui êtes allé le chercher ou c'est lui qui s'est proposé de vous aider ?
C'est nous ! Jean-Louis, notre batteur, a déjà eu l'occasion de jouer avec Nicolas lorsqu'ils accompagnaient Rodolphe Testut chez qui on a enregistré l'album dans son studio de la Grande Magnétique. Nicolas avait enregistré déjà pas mal d'albums et évidemment son parcours dans Dolly, Eiffel ainsi que les remplacements qu'il a pu faire, notamment dans No One is Innocent... Ça nous parlait ! Son approche et sa personnalité nous parlait aussi. Tout ça c'est concrétisé lors d'une première partie de Romain Humeau, Nicolas l'accompagnait sur scène dans son projet solo.

En plus, Nicolas Bonnière a un côté très expérimental dans sa création musicale... Qui pouvait vous ouvrir d'autres portes.
Totalement ! Il a beaucoup travaillé sur les guitares. Nicolas a amené le groupe a se libérer au niveau créatif. avec des essais sur des amplis, des pédales... Des idées que l'on aurait pas forcément eu ou fait aboutir. Pour la prod de la batterie, c'était une façon bien particulière d'enregistrer. Sur le type de batterie par exemple, on a changé plusieurs fois de grosse caisse, de micros, les cymbales aussi. 

Donc il a réellement apporté quelque chose à l'enregistrement de l'album
Il a été plus loin que le simple fait d'enregistrer notre album. Nicolas m'a aussi donné des directions précises dans ma façon de chanter et d'interpréter les titres.

J'ai trouvé que le cœur de tes textes durant les sept titres de l'album ont pour point commun de parler de l'humanité... Comment écris-tu tes textes ?
C'est impulsif. J'écris peu avant la musique. C'est la musique qui créé chez moi des images et qui me donne des thèmes. Ça sonne yaourt mais en français. Parfois, je fais du yaourt anglais et j'essaie de réutiliser les sonorités pour le mettre en français mais la plupart du temps j'improvise en français. Il y a des choses qui sont immédiates et qui collent avec mon impression de la musique. Il y a des thèmes récurrents, comme la quarantaine avec ses doutes, ses interrogations mais aussi le côté jubilatoire du rock'n'roll. La musique permet encore de dire aujourd'hui "on s'en fout, on verra bien".

Dans Garde les Yeux Ouverts, il y a un sample de 99 francs...
J'adore ce film et l'écriture de Frédéric Beigbeder ! J'aime ce personnage, Octave Parango, barré et fantasque. J'aime aussi Dujardin et je trouve le film très révélateur même s'il est très ancien maintenant. Il est toujours d'actualité. Ce sample dit que tout est provisoire. Ça va dans le sens de "Jusqu'ici tout va bien". Il faut en prendre conscience. C'est aussi cette idée de se dire que tout est à notre portée pour mieux faire. L'Homme a réalisé des choses incroyables et magnifiques. Mais on est au bord du précipice à jouer avec des bombes ou des blaireaux comme Trump, Kim Jung-Un, Boris Johnson et beaucoup d'autres tartufes qui nous éloignent du concret qui est l'humanité. Une petite partie possède les richesses et ne veut pas les partager. Il y a des gens qui sont dans une situation catastrophique. C'est dans le film, le moment où il se demande s'il se jette ou pas dans le précipice. Ce sample est bouleversant. 

Vous avez adapté un poème aussi dans Un Homme, tiré d'un écrit de Kipling. Pourquoi l'avoir adapté ?
C'est If de Rudyard Kipling. Ce n'est pas une adaptation, plus une inspiration... J'espère un hommage ! J'ai utilisé des phrases de son poème mais j'en ai aussi construit d'autres. Je ne suis pas bien sûr à son niveau d'écriture mais il y a des choses que j'ai du remodeler pour que ça me corresponde plus. C'est un poème que j'ai découvert adolescent avec la version de Bernard Lavilliers et que j'ai de suite adoré. Autant en anglais qu'en français. Lorsque j'ai eu l'occasion de trouver un texte qui collait à cette musique, ce n'est pas apparu de suite. J'ai écrit beaucoup de choses et puis le texte m'est apparu et je me suis dit "c'est ça". Ça a fait sens sur cette musique. Depuis vingt ou vingt-cinq ans, je me dis qu'il faut que je travaille sur ce texte de Kipling. Là, ça a été la concrétisation !

Vous allez bientôt travailler sur le clip d'Un Homme. Pourquoi avoir choisit ce titre pour une vidéo ?
Un Homme est le titre qui est le plus ressorti dans notre entourage. Il y a un côté road-movie. Beaucoup de gens ont une sensation de vitesse sur ce titre. Il est déjà en partie tourné et ce titre est remonté direct devant. Il y a cette prégnance de la transmission, de la parentalité qui est très forte chez moi. Je suis papa de deux garçons et ce texte avait beaucoup de sens et d'importance pour moi. Tout le monde l'a senti directement autour de moi. Ça ne veut pas dire que les autres titres ne sont pas dignes d'intérêt, loin de là. On a pensé à Mercy, Demodé... Moi j'étais sur Découvrir la Lumière. On a déjà un clip en scopitone fait avec A Tout Jamais. Mais Un Homme l'a emporté facilement et à l'unanimité.

Dernière question, tu as un scoop pour moi ?
J'aimerai bien ! On aimerait bien faire une reprise de Bashung avec une artiste... Mais on a des doutes quand au choix du morceau. Cet été, on s'y ait mis mais on s'est dit qu'on allait peut-être prendre du recul et trouver le bon titre avant de lui proposer... Et je ne sais pas si elle acceptera ou pas !

Commenter cet article