Ce soir vous jouez au Ravelin, un bar du centre de Toulouse. Comment vous êtes arrivés à jouer ici ?
* Arthur (guitare, chant) : Il y a toute une histoire autour de cette date. Initialement, on ne devait pas jouer au Ravelin, le concert devait se dérouler ailleurs mais il y a eu un tas de soucis autour de cette date. Nous ce qu'on voulait, c'était faire une date. On est plusieurs du groupe à avoir déjà joué au Ravelin avec d'autres formations. En plus c'est un bar franchement cool, c'est marrant de faire ce genre de dates.
C'est l'une de vos rares dates de cet été.. Il y en a une ou deux autres je crois.
* Arthur : En plus c'était bien, parce que c'était sur le chemin pour aller au Pointu Festival. On y va dès demain et on y joue dimanche. Ce concert est aussi organisé par des potes.
Ca fait un peu plus d'un an que Centaur Desire est sorti. Vous avez fait une grosse tournée, qu'est ce que vous retenez, ça vous a fait un peu évoluer ?
* Arthur : Je sais pas... Qu'est ce qu'on pourrait retenir ? Après quand tu fais beaucoup de dates, c'est toujours un peu pareil. Ca ne change pas forcément.
* Paula (chant) : Ce n'est pas un disque qui nous a fait faire un saut.
* Arthur : On vivait déjà dans des conditions correctes avant Centaur Desire, pour nous c'est pareil. Là on joue un peu moins puisque l'on va faire un autre disque plus tard. Sincèrement, ça fait longtemps qu'on fait le même type de tournées et le même truc. Tourner comme on le fait, c'est déjà super cool et on ne se pose pas des masses de questions.
Les titres de Centaur Desire ont évolués sur scène par rapport à l'enregistrement sur disque ?
* Arthur : J'enregistre tous les instruments, et forcément ça évolue quand on joue tous ensemble. Chaque disque est fait de la même manière. On arrive avec des morceaux déjà prêts et ensuite on les réinterprète tous ensemble en répétitions. Ca change forcément. Il faut trouver des trucs. Quand tu as bien mixé un titre, que tu l'as bien produit, il y a des milliers de choses que tu ne peux pas reproduire sur scène. On réinterprète à chaque fois, et c'est ça qui est cool. En plus, Centaur Desire, a été mieux produit que ceux d'avant, qui ont été produit un peu à l'arrache.
Vous avez changé de producteur pour ce disque ?
* Arthur : On s'enregistre seul, nous sommes auto produits.
* Paula : Depuis le début, il n'y a jamais eu de producteur.
* Arthur : Surtout, on en veut pas.
Arthur, c'est toi qui compose les titres du coup ?
* Arthur : J'écris la musique et Paula écrit les textes.
Comment se créé un titre de J.C Satàn ? D'abord la musique ou d'abord le texte ?
* Paula : La plupart des fois, c'est d'abord la musique. Des fois, il arrive que j'écris des choses que je peux adapter mais c'est rare. On part toujours de la musique.
* Arthur : On ne marche pas dans ce truc, d'auteur compositeur. C'est un groupe où on a pas tant de moyens que ça, alors il faut avancer de manière efficace. On écrit d'abord la musique et ensuite Paula met des textes dessus. C'est la manière la plus simple et évidente qui nous fait aller vite et rester naturels.
Vous pensez déjà la suite de Centaur Desire ? Vous avez des titres de prêts ?
* Paula : Oui, il y aura sans doute un album après Centaur Desire. Surtout que si l'on veut rejouer, il faut sortir quelque chose. Il y a des morceaux que l'on est un peu fatigués de jouer. Après, c'est plus à Arthur de nous dire s'il y a des choses ou pas de prêtes pour le futur album...
* Arthur : J'ai des idées qui viennent... Mais je travaille aussi différemment d'avant. Avant, tout partait d'un riff de guitare, maintenant c'est plus des idées de son. A côté, on découvre aussi d'autres choses, on fait un groupe avec Gaspard et on teste des trucs qui donnent des idées pour Satan.
Centaur Desire est votre cinquième album, ça doit devenir de plus en plus compliqué de faire une setlist pour les concerts ?
* Arthur : Franchement, je ne trouve pas. Il y a beaucoup de morceaux que l'on ne peut pas jouer. On arrive pas à les faire sur scène. Dans J.C Satàn, on aime pas les sets longs. En général, on joue le dernier album que l'on a sorti et quelques morceaux dont on ne peut pas trop se détacher ou de l'album d'avant. On joue peu nos vieux albums en général.
Vous misez sur la nouveauté et l'efficacité ?
* Arthur : L'intérêt c'est de se faire plaisir, d'arrêter les trucs que tu as pu jouer avant.
* Paula : Je n'arrive pas à comprendre comment des groupes peuvent jouer tout le temps les mêmes morceaux pendant 50 ans. Comment ils font pour ne pas être épuisés de les jouer à force ? On est musiciens, alors ce n'est pas l'usine, on a pas envie de faire tout le temps la même chose. Une fois que tu fais mille fois le même morceau, c'est impossible d'être toujours au taquet dessus.
* Arthur : Certains groupes changent leurs sets tous les soirs, mais pas nous. On cherche une dynamique, alors on créé un set qui marche bien. D'une tournée à l'autre, on change. Sinon ça devient fatiguant à jouer. De temps en temps, on peut tenter de rajouter un morceau mais en général, on fait un set comme un morceau. Ca monte, ça descend, ça revient. Pour ça, on essaie de trouver un ordre qui marche, quelque chose de cohérent.
Vous êtes un groupe assez difficile à classer musicalement. Comme tu le disais tout à l'heure, il y a des vagues... A la fois de noise, de psyché, de garage. Si vous pouviez décrire votre musique en trois mots ?
* Paula : Fils de pute !
* Arthur : C'est hyper dur à faire... En plus je trouve que ce n'est pas à nous de le faire. C'est aux gens de le faire. On a nos références, on sait ce qui a pu nous intéresser et nous faire faire ce genre de musique. Après quand le public fait un retour sur ta musique, il n'a pas forcément les mêmes références que toi et il va voir des choses que tu n'avais pas imaginé. Ca a peu d'intérêt de dire "on est ça" alors que le public entend un autre groupe. Par contre que les gens trouvent trois mots pour nous décrire, pourquoi pas.
Est-ce qu'il y a des groupes avec lesquels vous aimeriez faire des splits albums ?
* Arthur : On a déjà fait pas mal de splits avec des potes.
* Paula : Faire un split pour faire un 45 tours... Le label ne gagne pas beaucoup d'argent dessus. C'est toujours des plus petits labels qui sont intéressés par ce genre de projets. J'ai l'impression qu'il y a moins de petits labels, c'est chiant...
* Arthur : Il en reste encore quand même... Après je pense, qu'il y a des groupes chauds pour faire des splits albums. En fait pour moi, ce genre de projets se faire naturellement et entre potes. Tu te dis pas "tiens j'aimerai travailler avec ce groupe". On a déjà fait quatre ou cinq splits, et ça a toujours été avec des potes qui avaient des groupes. Se dire que tu veux faire un album avec tel groupe sans trop les connaître, c'est une démarche commerciale. Ca existe dans le monde de la musique commerciale, où tu te dis "Tiens j'aimerai travailler avec cette personne".
A notre échelle, tu n'abordes pas quelqu'un en lui disant "Bonjour on est JC Satàn, vous vous êtes machin, on se croise un peu sur scène. Est ce que l'on ne pourrait pas faire un disque ensemble ?" Nous on est dans un milieu presque pas commercial, alors si on doit faire des splits c'est avec des potes. On tourne dans des smacs maintenant, mais on a gardé notre état d'esprit d'avant les smacs. On pousse pas non plus les groupes de potes à venir jouer avec nous. On est assez flemmards, on ne demande jamais. Une fois on a fait un split de balade dans un endroit en Belgique appelé La Barrière. On passait quelques jours là-bas et on s'est dit qu'on allait enregistrer un truc. Le split s'appelle Ballade à la Barrière et on l'a fait parce qu'on a eu l'occasion de le faire... Et voilà.
J'avais une question sur les paroles, qu'est ce que ça raconte les paroles de J.C Satàn ?
* Paula : Un peu de tout. Les thèmes sont larges. Ca peut être l'amour, la drogue, sortir avec des potes, la vie... Je parle de tout. Au début, il y avait pas mal de textes sur la religion. J'ai un peu arrêté avec ça, mais on joue encore des titres qui parlent de religion. On joue un peu sur le nom.
* Arthur : Certains titres sont engagés.
* Paula : Oui c'est vrai, certains titres sont un peu engagés. Depuis cette année, il y a un morceau féministe. J'écris aussi sur des rencontres. Par exemple, Erika, est sur une fille que l'on a rencontré en Chine.
En parlant de religion, avec un nom pareil vous n'avez jamais eu d'ennuis avec Christine Boutin ?
* Arthur : Christine Boutin, c'est la tante de Romain, notre batteur !
* Paula : Pour de vrai, il s'appelle Romain Boutin. C'est vraiment sa tante.
* Arthur : C'est sa tante directe.
* Paula : Elle ne doit pas savoir que l'on existe.
* Arthur : Dans leur famille, ils ne parlent pas des masses avec tata Christine.
* Paula : On a jamais trop exploité ce truc d'ailleurs. Il faudrait exploiter ce truc un peu plus.
* Arthur : Ce qui est nul, c'est que dans notre pays tu peux avoir l'air d'un taré d'intégriste catholique. Tu n'auras quasiment aucun soucis. Alors que tout autre intégrisme religieux peut faire peur à tout le monde. Par contre, si tu es un taré catholique, ils s'en foutent. J.C Satàn, comme nom, les gens trouvent ça juste marrant. Peut-être que si on s'appelait Sheitan, ils nous casseraient plus les couilles. Mohamed Sheitan on aurait du s'appeler... Là on aurait peut être eu des emmerdes.
Est-ce que vous avez des groupes à faire découvrir ?
* Arthur : Il y en a beaucoup. Tous les groupes que l'on fait. Il y a Mandingo, un groupe que j'ai. Un autre groupe que j'ai avec Gaspard, qui n'a pas de nom parce qu'on le change à chaque concert.
* Paula : C'est vraiment idiot, vous avez joués il n'y a pas longtemps à Bordeaux et vu que je ne savais pas qui était le groupe, je ne suis pas allé voir !
* Arthur : En plus, c'est pas mal ! On est en train d'enregistrer et ça va être un bel album. Sinon, il y a Cockpit le groupe de Gaspard qui est génial.
* Paula : Il y a aussi Bryan's Magic Tears.
* Arthur : Il y en a tellement, mais surtout ce qui serait bien, c'est que les gens se bougent le cul pour les découvrir tout seul. Sincèrement, il faut arrêter d'assister les gens. Quand tu connais Satàn, c'est vraiment pas compliqué de regarder tous les liens que l'on poste pour faire découvrir des groupes. Tu tapes Satàn sur internet et en fouillant, tu vas trouver des milliers de groupes géniaux. Pareil, tu tapes Born Bad, tu trouveras aussi des trucs cool. C'est internet, ce n'est pas compliqué.
Ce n'est pas en demandant à des groupes qui ont peu de visibilité comme nous, que ça va faire découvrir d'autres groupes. Il faut dire aux gens de se bouger. Ils ont le nom du groupe, internet et maintenant c'est à vous de jouer et c'est facile de découvrir des groupes et même des supers groupes de ta région. Moi je ne connais déjà pas la moitié des bons groupes qu'il y a sur Toulouse par exemple. Il y a toujours des nouveaux. Si les gens aiment Satàn, c'est qu'ils aiment le milieu indépendant et ce qui est important c'est d'y participer en étant curieux.
Dernière question, est ce que vous avez un scoop pour moi ?
* Arthur : Déjà tu as Christine Boutin c'est pas mal... On ne le raconte pas à chaque fois ça !
* Paula : Tu vas peut-être ouvrir le meilleur studio d'enregistrement du monde, bientôt !
* Arthur : Avec Dorian et Romain, on veut acheter une maison à la campagne et monter un studio vraiment cool. Ce sera un lieu qui prendra beaucoup moins cher que beaucoup de studios énormes et pour des groupes dans le milieu duquel on vient. Des groupes qui veulent enregistrer mieux tu vois mais sans sonner non plus mainstream. C'est un truc que l'on saura faire et sans non plus demander trop cher.
* Paula : Tu ne vas jamais accepter des groupes qui font des Ulule pour payer l'enregistrement.
* Arthur : Interdit aux groupes qui font des cagnottes... Franchement, je préfère dire au groupe "Allez vient je t'enregistre gratos cette fois-là". C'est hyper mauvais. Ce genre de dispositif c'est bien pour acheter des livres d'arts où tu as des mecs dont tu peux voir la production. Pareil pour des jeux vidéos qui se développent. Pour un disque c'est différent, tu ne peux pas demander aux gens d'écouter tes titres pendant la production. Faire payer les gens avant de faire quelque chose dans la musique, je trouve ça carrément infâme. Tu leur voles 4 000 boules pour aller dans un studio de merde.
* Paula : Surtout que c'est jouable d'enregistrer sans dépenser de sous. Nous on l'a fait. Aujourd'hui, c'est faisable de tout faire soi-même pour un enregistrement.
* Arthur : On a quand même fait trois albums enregistrés directement sur une carte son, sans amplis et sans batterie. Il faut faire avec les moyens que tu as au début, voir ce que tu es capable de faire.
* Paula : Je comprends que tout le monde n'ait pas envie de faire la musique et d'être son propre ingé-son. Mais il y a des choses faisables sans aide extérieure.
* Arthur : Surtout pour les groupes qui débutent... Certains veulent aller dans des putains de studios d'enregistrements direct et c'est débile. Tu connais pas trop ton son, ni ton matos et c'est quelqu'un d'extérieur à ton groupe qui va diriger ce que tu vas faire au final. Ce sera pas ta musique comme tu la sens. Alors que si tu testes avec un pote qui te connais et qui fait attention à toi, même si tu fais des erreurs, c'est bien plus personnel. Même si le son n'est pas top, ce qui compte c'est d'écouter de bonnes chansons. Il faut être patient dans la musique et ne pas brûler les étapes. Tu ne peux pas faire un Kickstarter où c'est tes parents qui vont se ruiner pour mettre les 2 000 boules qu'il manque sur les 3 000 demandés. Ce n'est pas bon non plus pour les petits labels, ils ont un rôle. Quand tu sors ton album seul, tu ne passes pas forcément par un label et ça c'est nul, parce qu'il faut aussi les faire vivre. Faut arrêter de croire qu'on peut se démerder seul. Il y a des gens qui ont des rôles superbes.
* Paula : Mais pas les gens qui enregistrent, ça il faut le faire seul !
* Arthur : Mais non ! Si t'es sur Toulouse et que tu veux pas t'enregistrer seul, il faut aller voir Lo Spider, il le fera très bien. Ce que je dis c'est qu'il ne faut pas entrer dans le monde du studio de luxe... Quand tu n'es pas un groupe qui peut se le permettre ! Si tu as les moyens de te faire produire par Paul McCartney ou Steve Albini, tu y vas, ça on s'en fout. Tu fais quand tu peux le faire. Parce que demander aux gens de payer parce que tu n'es pas capable de le faire à ce moment-là, je trouve ça gênant. Il ne faut pas brûler les étapes, si tu ne fais pas ça correctement, tu seras une énorme merde qui aura juste l'air d'être au niveau et tu vas plonger direct derrière.
* Paula : Sinon tu peux aussi cambrioler une banque, ça fait une bonne histoire derrière. Le mec qui fini en prison juste parce qu'il a voulu enregistrer un disque. Tout le monde l'achètera.
* Arthur : Sinon fais quelque chose de mal... Qui impliquent des risques tellement fort que ce mérité de mettre 4 000 boules pour produire ton album dans un studio qui ne saura même pas te faire sonner.